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La biologie du Malus domestica Borkh. (pommier commun)
4. Biologie

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4.1 Biologie de la reproduction

Le M. domestica se reproduit naturellement par la graine. La plupart des cultivars dépendent de la pollinisation pour la production de graines, mais certains peuvent produire des graines sans qu'il y ait fécondation (graines apomictiques) (Westwood, 1993). Certains cultivars peuvent aussi se multiplier par voie végétative, par drageonnement (Hancock et al., 2008; Westwood, 1993). La majorité des cultivars ne peuvent pas s'autopolliniser, en raison d'un mécanisme d'auto-incompatibilité gamétophytique faisant appel à un gène multiallélique du locus S, le gène S-RNase (Sassa et al., 1994). À cause de cette auto-incompatibilité, la plupart des cultivars présentent un taux élevé d'hétérozygotie. Lorsqu'ils se reproduisent par la graine, leurs caractères ne sont donc pas stables : ils présentent une très grande variabilité et produisent généralement des fruits dont la taille, l'aspect et la qualité sont médiocres (Webster et Wertheim, 2003). Les gènes d'incompatibilité des différents cultivars sont suffisamment disparates pour que la quasi-totalité des cultivars puissent se féconder entre eux. De nombreuses études ont été réalisées dans ce domaine, et des listes de compatibilité sont généralement disponibles (Kemp, 1996). Il faut consacrer environ 10 % d'un verger à des cultivars pollinisateurs (fournisseurs de pollen) pour assurer une production stable. On peut utiliser, comme pollinisateur, un autre cultivar de pommier compatible, ou encore un cultivar de pommetier spécialisé (Maggs et al., 1971; Westwood, 1993). Les pommetiers sont souvent utilisés comme source de remplacement ou source supplémentaire de pollen, car ces arbres fleurissent abondamment et fournissent de grandes quantités de pollen compatible. La pollinisation des fleurs du M. domestica est essentiellement assurée par les insectes, surtout par les abeilles dans les vergers commerciaux (voir la section 4.4). Les grains de pollen mûrs comportent trois sillons germinaux et présentent des plis ou des rides qui les rendent rugueux (Pratt, 1988). Comme ces grains sont lourds et de grande taille, il y a très peu de pollinisation par le vent.

Le développement des fleurs prend environ 10 mois. Il débute avec la transition du stade végétatif au stade reproducteur (à la fin de juin dans l'hémisphère Nord) et se termine avec l'anthèse (fin avril à début mai) l'année suivante (Dennis, 2003; Kotoda et al., 2000). La floraison a lieu au début du printemps; les inflorescences ressemblent à des cymes et comportent 4 à 6 fleurs, blanches à rose foncé. La fleur centrale est la première à s'épanouir. La plupart des inflorescences apparaissent au bout de dards, mais il arrive aussi qu'elles poussent latéralement sur les longs rameaux. Dans le cas des fleurs portées sur des dards courts, la transformation des bourgeons végétatifs en bourgeons floraux débute 4 à 6 semaines plus tôt que dans le cas des fleurs portées latéralement (Jackson, 2003). Les fleurs sont hermaphrodites. L'ovaire est enveloppé par la coupe florale, et les autres pièces florales sont placées au-dessus de l'ovaire. La fleur compte habituellement cinq carpelles (qui renferment chacun deux ovules), cinq sépales, cinq pétales, 20 étamines et cinq styles (Dennis, 2003; Rieger, 2006). De nombreux facteurs biotiques (phytohormones endogènes, charge fruitière de l'année précédente, pathogènes et autres organismes nuisibles) et abiotiques (lumière, stress hydrique, nutriments, température et substances chimiques exogènes) peuvent avoir une incidence sur la floraison, tout comme les pratiques culturales utilisées, notamment le greffage, la taille, la pratique d'incisions et/ou le garrottage (Jackson, 2003).

Le stigmate produit des sécrétions extracellulaires qui créent un milieu humide favorisant le dépôt et la germination du pollen (Jackson, 2003). Une fois que le grain de pollen a germé, le tube pollinique se développe le long du style jusqu'à atteindre un ovule. La fécondation de l'oosphère (production d'un zygote) et des noyaux polaires du sac embryonnaire (production de l'albumen) a alors lieu (Dennis, 2003). Le taux de fertilité du pollen de la plupart des cultivars est de près de 100 %, mais ce taux est réduit pour des raisons inconnues chez certains cultivars, comme 'McIntosh', et pour cause de triploïdie chez d'autres cultivars, comme 'Jonagold'. La période de floraison durant laquelle du pollen viable est produit varie selon les conditions météorologiques et dure habituellement 7 à 30 jours. La période de pollinisation effective, soit la période durant laquelle l'ovule peut être fécondé moins le temps requis pour le développement du tube pollinique jusqu'à l'ovule, varie de 2 à 9 jours (Pratt, 1988). La longévité des ovules est donc un facteur limitant pour la nouaison (formation de fruits).

Chez la plupart des cultivars, les fruits arrivent à maturité 120 à 150 jours après la floraison et pèsent environ 150 à 350 grammes (Rieger, 2006). Le développement des fruits peut être divisé en trois étapes : i) au cours des 25 premiers jours, les pétales tombent et la croissance des fruits est rapide; l'embryon présent dans la graine se développe lentement, et la croissance se fait essentiellement par division cellulaire; ii) au cours des 50 jours suivants (jusqu'à 75 jours après la chute des pétales), l'embryon se développe rapidement, et le fruit s'approche de sa taille définitive; la croissance résulte principalement de la croissance cellulaire; iii) au cours des 14 derniers jours environ (jusqu'à 90 jours après la chute des pétales), le tégument des graines brunit, et les fruits grossissent légèrement, mûrissent et, chez certains cultivars, tombent (Pratt, 1988). Chez les pommiers cultivés, entre 1 et 5 % environ des fleurs produisent des fruits mûrs. Les autres fleurs n'en produisent pas en raison de l'absence de pollinisation, de la compétition entre fruits ou des pratiques culturales utilisées (éclaircissage visant à augmenter la taille et la qualité des fruits et à empêcher le phénomène d'alternance). L'alternance se produit lorsqu'une récolte abondante inhibe la formation des boutons floraux, ce qui a pour effet de réduire la floraison au cours de l'année suivante (Jackson, 2003). Dans les zones tempérées du nord, les fruits sont cueillis entre le début d'août et la fin de novembre et peuvent être entreposés jusqu'à un an, selon les cultivars. À maturité, un grand pommier cultivé peut produire quelque 2 000 fruits par année, ce qui équivaut à 10 000 graines, et peut vivre 50 ans ou plus. Il peut donc, en théorie, produire 500 000 graines au cours de son existence.

4.2 Sélection

Les pommiers commerciaux sont composés de parties distinctes sur le plan génétique. Le porte-greffe comprend le système racinaire et une petite partie du tronc, alors que le greffon comprend la plupart des parties aériennes de l'arbre, y compris celles qui produisent des fruits. Les techniques de greffage, dont l'écussonnage, permettent d'implanter un greffon sur un porte-greffe (Webster et Wertheim, 2003). Comme il est mentionné à la section 4.1, les cultivars de pommier sont hétérozygotes : les fruits résultant d'une pollinisation libre donnent des graines très variables, ce qui fait que les cultivars ne peuvent être multipliés au moyen de semences. La culture et le maintien de cultivars de M. domestica présentant les caractères voulus reposent donc sur des méthodes de multiplication végétative, comme le greffage, le marcottage ou d'autres méthodes de multiplication clonale (Dennis, 2003; Rom et Carlson, 1987). Les porte-greffes sont surtout utilisés pour la multiplication clonale des cultivars (Webster et Wertheim, 2003). D'autres caractères importants sont aussi conférés par le porte-greffe à l'arbre greffé. Le porte-greffe peut avoir une incidence sur la vigueur de la croissance végétative, la grosseur des fruits, leur taux de croissance et leur précocité de maturation ainsi que le rendement de la partie greffée de l'arbre. Il peut aussi jouer un rôle dans la sensibilité aux facteurs de stress biotiques et abiotiques (Webster et Wertheim, 2003). Comme le pommier cultivé est composite, certains cultivars sont sélectionnés pour les qualités du greffon fructifère, alors que d'autres sont mis au point en fonction de caractères importants recherchés pour le porte-greffe.

Certains cultivars comportent de nombreuses souches, qui diffèrent du cultivar original par leur port, la couleur de leurs fruits ou leur précocité de maturation. On croit que les souches résultent de mutations somatiques naturelles se produisant chez des cultivars établis, qui sont alors sélectionnés et multipliés en vue de l'amélioration des caractères. Certains cultivars comportent de nombreuses souches. C'est le cas du cultivar 'Red Delicious', pour lequel 250 souches différentes ont été décrites et cultivées (Penn State University, 2013).

Les programmes de sélection modernes visent principalement l'augmentation de la qualité ou du rendement commercialisable des fruits, la réduction des coûts de production et l'accroissement de la résistance aux organismes nuisibles (Hancock et al., 2008; Laurens, 1999).

L'amélioration génétique des cultivars ne peut pas se faire rapidement, en raison de plusieurs caractéristiques du M. domestica, notamment la longueur de stade juvénile, les grandes dimensions de l'arbre et l'existence du mécanisme d'auto-incompatibilité, combinés au taux élevé d'hétérozygotie et de dépression de consanguinité (Brown et Maloney, 2003). La méthode de sélection classique la plus souvent utilisée est celle du rétrocroisement modifié. Elle consiste à utiliser un parent récurrent différent à chaque génération produite par rétrocroisement. Ce processus est long et laborieux. Ainsi, il a fallu plusieurs décennies pour réussir à introgresser chez un cultivar commercial un caractère de résistance à la tavelure provenant d'un pommetier (Gessler et Pertot, 2012). Certains caractères, dont la qualité des fruits, sont soumis à de nombreux facteurs environnementaux et génétiques, ce qui complique encore davantage leur mise au point et leur amélioration par des méthodes de sélection (Brown, 2012; Kumar et al., 2012a). La sélection assistée par marqueurs est une stratégie employée dans le cadre des programmes de sélection modernes; elle consiste à utiliser des marqueurs génétiques associés à un caractère donné durant le processus de sélection, l'objectif étant d'intégrer le marqueur, et donc le caractère voulu, à de nouveaux cultivars. Cette méthode présente plusieurs avantages par rapport à l'évaluation du phénotype. Elle permet notamment d'éliminer les facteurs environnementaux du processus de sélection et de procéder plus rapidement au tri (habituellement au stade du semis), ce qui entraîne une réduction des coûts de sélection globaux (superficie de terrain nécessaire, maintenance, évaluations sur le terrain) (Khan et al., 2012). La sélection assistée par marqueurs s'est avérée efficace pour l'intégration de caractères associés à des locus à effet majeur (p. ex., fruit à chair rouge) dans le cadre de programmes de sélection de pommiers (Chagné et al., 2007). Cette technique a cependant soulevé des difficultés pour les nombreux caractères associés à de multiples gènes à effet mineur, appelés caractères quantitatifs ou polygéniques (Kumar et al., 2012a).

Le génome du M. domestica a récemment été séquencé (Velasco et al., 2010), ce qui a entraîné une intensification des efforts visant l'établissement de liens entre caractères et marqueurs. Des chercheurs ont entrepris des projets à grande échelle, échelonnés sur plusieurs années, afin de combler les lacunes existant entre la génétique moléculaire et la sélection (p. ex., RosBREED, Fruit Breedomics Consortium) (Fruit Breedomics Consortium, 2012; Iezzoni et al., 2010). Ces travaux ont déjà des répercussions significatives sur l'amélioration génétique. Chagné et al. (2012) ont utilisé des données sur la séquence génomique de 27 cultivars de pommiers d'importance mondiale (produits par RosBREED) pour mettre au point une puce à SNP (pour Single Nucleotide Polymorphism, ou polymorphisme mononucléotidique) à large couverture (Chagné et al., 2012), et l'assemblage d'autres puces à SNP a été signalé (Khan et al., 2012). La mise au point de tels outils ouvre la voie à des méthodes d'amélioration génétique novatrices, telles que la sélection génomique. Il s'agit d'une méthode statistique qui permet d'estimer le potentiel de sélection. La sélection génomique s'est avérée efficace pour la sélection de caractères polygéniques complexes (Jannink et al., 2010). Elle a récemment donné de bons résultats pour la sélection de caractères ayant trait à la qualité des pommes (Kumar et al., 2012b).

Des progrès réalisés récemment à l'aide de méthodes transgéniques ont permis de surmonter certains goulots d'étranglement du processus de sélection. On a ainsi pu réduire la longueur du stade juvénile à l'aide de telles méthodes (Flachowsky et al., 2007). L'intégration et l'expression constitutive du gène mads4 provenant du bouleau pubescent ont entraîné une réduction significative de l'âge à la première floraison : les tissus transformés ont fleuri en culture tissulaire et ont produit en un an une nouvelle génération. L'utilité de la précocité de la floraison pour accélérer la sélection a été démontrée dans le cadre d'un processus de sélection assistée par marqueurs visant à accroître la résistance au feu bactérien, à la tavelure du pommier et à l'oïdium sur une très courte période de deux ans (Flachowsky et al., 2011). Le consortium Fruit Breedomics (Fruit Breedomics Consortium, 2012) utilise actuellement cette technique afin de réduire le temps nécessaire pour l'introgression de caractères en vue de la mise au point de cultivars. Un autre exemple récent de sélection par transfert génétique ciblé est la mise au point, chez le cultivar non résistant 'Gala', d'individus résistants à la tavelure mais n'ayant pas le marqueur (Vanblaere et al., 2011). Ces travaux sont significatifs, car l'étude reposait sur une technique cisgénique, utilisée pour la toute première fois avec succès pour une culture. La technique cisgénique diffère de la technique transgénique de l'ADN recombinant en ce que la totalité des gènes insérés (y compris les régions flanquantes, le promoteur, les introns, les exons et les séquences de terminaison dans l'orientation sens) sont issus d'un sujet, en l'occurrence le M. floribunda, pouvant être croisé avec le receveur. Le M. floribunda est une espèce de pommetier naturellement résistante à certaines souches du champignon causant la tavelure du pommier (Vanblaere et al., 2011).

4.3 Pratiques culturales et usages

La plupart des pommiers plantés dans les vergers commerciaux proviennent de pépinières spécialisées en arbres fruitiers. Cependant, certains pomiculteurs produisent eux-mêmes leurs arbres. On peut choisir des porte-greffes qui réduisent la vigueur des greffons, mais la grandeur des pommiers adultes dépend aussi de la vigueur propre du greffon, des conditions du milieu et de la taille pratiquée (Webster et Wertheim, 2003). Les arbres sont généralement de hauteur standard (100 %), semi-nains (60 à 85 % de la hauteur standard) ou nains (20 à 50 % de la hauteur standard) (Parker, 1993). Les arbres nains présentent plusieurs avantages : on peut les planter plus près les uns des autres, la taille, la conduite et la récolte peuvent se faire depuis le sol, l'application de pesticides présente un taux d'efficacité supérieur et la production de fruits est plus hâtive que dans le cas des arbres standards, ce qui constitue un avantage économique attrayant pour les producteurs (Parker et Unrath, 1998). Au Canada, on a planté de plus en plus de vergers commerciaux à forte densité au cours de la dernière décennie (AAC, 2012). La plantation de tels vergers coûte plus cher et demande plus de travail au départ, car la charpente réduite des arbres nains ne peut supporter le poids de fortes récoltes. Pour résoudre ce problème, on a recours à des systèmes de soutien ou de conduite pouvant prendre diverses formes : perches de bois, super fuseau, fuseau étroit, axe vertical et treillis vertical (Parker et Unrath, 1998; Sanders, 1994; van Dalfsen, 1989) . Bien que la tendance soit à la plantation de vergers de pommiers nains à forte densité depuis quelques années, on plante encore des arbres semi-nains et de hauteur standard dans les régions où les conditions climatiques et le sol ne conviennent pas aux porte-greffes nanisants (Webster et Wertheim, 2003). Au Canada, les pommiers sont habituellement plantés au printemps, à raison de 150 à 250 arbres par acre pour les pommiers standards et de 500 à 2 000 arbres et plus par acre pour les pommiers nains, selon le porte-greffe et le mode de conduite adopté (Parker et Unrath, 1998; Sanders, 1994; van Dalfsen, 1989) . Outre le porte-greffe et le mode de conduite, plusieurs autres facteurs doivent être considérés pour l'établissement d'un verger, dont le choix du cultivar principal et du ou des cultivar(s) pollinisateur(s), le type de sol et sa fertilité, l'irrigation, le drainage du sol et l'espacement entre les rangs et entre les arbres sur le rang.

Les arbres doivent passer du stade juvénile au stade adulte pour fleurir et produire des fruits. Plusieurs caractères physiologiques et morphologiques sont propres au stade juvénile : feuilles glabres et lobées, tiges rampantes, présence d'épines sur les tiges, semi-persistance (chez les espèces à feuilles caduques), facilité d'enracinement des tiges, teneur moindre des tissus en acide ribonucléique, etc. (Westwood, 1993). On utilise habituellement pour le greffage des rameaux adultes ou des écussons, et la croissance végétative subséquente produit des tissus adultes (Westwood, 1993). Les arbres de pépinière nouvellement plantés passent toutefois par un stade non florifère connu sous le nom de stade végétatif adulte (Westwood, 1993). Le type de porte-greffe utilisé a une incidence directe sur la précocité du greffon. Le mécanisme en cause est cependant encore mal connu (Webster et Wertheim, 2003). Les greffons entés sur des porte-greffes nanisants commencent à produire des fruits environ 2 à 4 ans après la plantation. Pour les greffons entés sur des porte-greffes semi-nanisants, il faut compter environ 2 à 6 ans après la plantation; pour les greffons entés sur des porte-greffes vigoureux, cette période est de 6 à 10 ans environ (Parker, 1993). Bien qu'aucune production commerciale ne soit possible durant le stade végétatif adulte, on doit quand même gérer plusieurs aspects d'ordre agronomique à ce stade – y compris la nutrition (irrigation fertilisante ou application d'engrais au sol), la lutte antiparasitaire, la lutte contre les mauvaises herbes, l'irrigation et la taille – pour favoriser la croissance des arbres (Sanders, 1994).

La culture du M. domestica exige beaucoup de main-d'œuvre et d'interventions, surtout lorsque le verger atteint la maturité et que la production commerciale peut débuter. Le tableau 1 présente le calendrier des principales mesures qui sont généralement prises pour la production de pommes au Canada.

Tableau 1. Calendrier sommaire des principales mesures qui sont généralement prises pour la production de pommes au Canada (adapté de AAC, 2011).
Description pour personnes avec déficience visuelle :

Le but du tableau est de souligner l'horaire typique de gestion pour la production de pommes au Canada. Il décrit les mesures prises à chaque saison (hiver, printemps, été, automne) pour cultiver des pommes au Canada.

Période de l'année Mesure
Hiver – dormance (décembre à fin avril)
  • taille dedormance longue des arbres
  • application d'azoteet de sulfate de zinc
  • pulvérisation dedormance contre les organismes nuisibles
Printemps – du stade de la pointe verte à la nouaison(fin mars à mai)
  • taille etconduite des arbres
  • implantation deruches dans les champs, au début de la floraison
  • application d'agentsd'éclaircissage chimiques
  • application denutriments au sol
  • mesures de surveillanceet de lutte contre les insectes et les maladies
  • mesures de surveillanceet de lutte contre les mauvaises herbes
Été – croissance des fruits
(juin à août)
  • taille d'été etconduite des arbres
  • pulvérisation de nutriments(y compris de calcium)
  • mesures desurveillance et de lutte contre les insectes et les maladies
  • mesures desurveillance et de lutte contre les mauvaises herbes
Automne – récolte
(septembre à novembre)
  • récolte despommes

La durée de vie moyenne d'un verger commercial à forte densité est de moins de 20 ans, mais de nombreux vergers maintiennent un niveau de production adéquat plus longtemps (Nova Scotia Department of Agriculture, 2009; H. Ardiel, comm. pers.). La durée de vie d'un verger commercial dépend de plusieurs facteurs, dont la santé des arbres, le cultivar de pommier utilisé, la qualité du sol, les conditions du milieu (degrés-jours de croissance, dommages causés par le froid), les débouchés, etc. L'évolution des préférences des consommateurs pour certaines variétés de pommes peut aussi influer sur la décision de replanter un verger.

Les pommes cultivées au Canada et dans le monde sont principalement consommées à l'état frais (AAC, 2011; Jackson, 2003; O'Rourke, 2003). Une fois cueilli, le fruit peut être entreposé jusqu'à un an en atmosphère contrôlée (Janick et al., 1996). Les pommes sont aussi utilisées pour la production de jus et de concentré, de cidre, de tranches de pommes fraîches, de garniture de tarte, de compote de pommes, de pâte de fruits déshydratée, de barres de fruits séchés et d'autres produits. Les sous-produits de fabrication, comme le marc de pomme issu de la production de jus, peuvent notamment servir à l'alimentation du bétail ou d'animaux sauvages, à la préparation d'aliments, comme des produits de boulangerie, ou à l'extraction d'esters aromatiques. Les qualités nutritionnelles de la pomme sont bien connues. La pomme est une collation naturelle qui contient peu de gras; sa teneur en sucre est de 11 à 16 %. Elle est également une bonne source de potassium et de fibres solubles, dont la pectine et d'autres glucides complexes, ainsi que d'antioxydants phénoliques (Vinson et al., 2001). On a pu constater que la consommation régulière de pommes dans le cadre d'une alimentation saine peut contribuer au maintien d'une bonne santé et à la prévention de maladies chroniques (Boyer et Liu, 2004).

Au Canada, les pommes des vergers commerciaux sont vendues à l'échelle locale, nationale et internationale. En 2010, la production commercialisée totale de pommes s'est élevée à 336 834 tonnes métriques (tm) (AAC, 2012). En 2010, le Canada a exporté 25 969 tm de pommes fraîches vers différents pays, dont les États-Unis (81 %), le Royaume-Uni (7 %), le Mexique (6 %) et Taïwan (5 %) (AAC, 2012). La même année, le Canada importait 191 714 tm de pommes fraîches des États-Unis (79 %), du Chili (13 %), de Nouvelle-Zélande (4 %), de Chine (2 %) et d'Afrique du Sud (1 %).

4.4 Flux génétique associé à la production commerciale de pommes

Les insectes, surtout les abeilles domestiques mais aussi les bourdons, d'autres abeilles sauvages et, dans une moindre mesure, certains diptères, sont les principaux agents de pollinisation dans les vergers commerciaux, car le pollen des pommiers est lourd et n'est pas facilement transporté par le vent (Dennis, 2003; Jackson, 2003). Dans les vergers, la majorité des vols effectués par les abeilles pour butiner se font entre les fleurs d'un même arbre; viennent ensuite les vols entre les arbres voisins situés sur un même rang et, dans une moindre mesure, les vols d'un rang à l'autre (Free, 1966; Free et Spencer-Booth, 1964). Les producteurs louent habituellement des ruches d'abeilles domestiques lorsque les vergers sont en fleurs. Dans les vergers adultes, il est recommandé de placer quatre à cinq colonies bien établies par hectare (Dennis, 2003).

Dans un verger commercial, on recommande de choisir un cultivar différent compatible pour un faible pourcentage des arbres (environ 10 %), afin de disposer de quantités suffisantes de pollen adéquat pour la nouaison (Westwood, 1993). L'espacement des cultivars pollinisateurs dans le verger peut varier : ils peuvent être plantés en rangs complets, être disséminés dans le verger, ou être introduits sous forme de greffons. Si les arbres pollinisateurs ne peuvent produire suffisamment de pollen, on peut placer dans tout le verger des branches fleuries, aussi appelées bouquets, appartenant à d'autres cultivars.

Des chercheurs ont étudié le transfert de pollen afin d'optimiser l'aménagement des vergers (Kron et al., 2001; Maggs et al., 1971; Wertheim, 1991) et d'évaluer le risque de flux génétique chez les espèces du genre Malus (Larsen et Kjær, 2009; Reim et al., 2006; Soejima, 2007; Tyson et al., 2011) . Maggs et al. (1971) ont observé que dans un verger entièrement constitué de pommiers 'Granny Smith' où l'on avait placé des bouquets fournissant un pollen compatible, la distance maximale de dispersion du pollen s'établissait à environ 12 m de la source de pollen. À l'aide du cultivar 'Baskatong', doté d'un gène dominant conférant aux feuilles une couleur rouge, Wertheim (1991) a étudié le flux génétique dans des pommeraies en observant le pourcentage de semis à feuilles rouges issus d'arbres se trouvant à des distances croissantes du pollinisateur 'Baskatong'. Les résultats de cette étude portent à croire que la plus grande partie de la pollinisation croisée se produit à moins de 15 m de l'arbre pollinisateur. Reim et al. (2006) ont aussi utilisé la couleur rouge des feuilles comme marqueur pour étudier le flux génétique dans une pommeraie. Ils ont déterminé que 69 % des graines issues d'une fécondation par le pollen des cultivars pollinisateurs se trouvaient dans les premiers 10 m et que 91 % de ces graines se trouvaient à moins de 60 m du cultivar pollinisateur. Toujours à l'aide d'une méthode fondée sur la couleur rouge des feuilles, Soejima (2007) a déterminé qu'environ 65 % des graines issues d'une fécondation par le pollen des cultivars pollinisateurs se trouvaient à moins de 8 m et qu'environ 95 % de ces graines se trouvaient à moins de 60 m du cultivar pollinisateur.

Dans une étude portant sur une population sauvage de pommetier M. sylvestris, Larsen et Kjaer (2009) ont utilisé des données sur des locus microsattelites et des mesures de distance entre les arbres pour analyser le transport du pollen en milieu naturel. Ces auteurs ont constaté que la pollinisation se produisait principalement entre des arbres voisins, la distance médiane étant d'environ 23 m (Larsen et Kjær, 2009). Kron et al. (2001) ont utilisé des allozymes marqueurs pour déterminer la généalogie des graines et ainsi suivre le flux de pollen dans les vergers. On a choisi un allozyme marqueur provenant du cultivar 'Idared' pour examiner les graines issues d'une pollinisation libre produites par d'autres cultivars se trouvant à des distances croissantes des rangs de pommiers 'Idared'. De façon générale, la dispersion du pollen a diminué avec l'augmentation de la distance, 50 % des graines issues du cultivar 'Idared' ayant été produites dans les quatre premiers rangs, ce qui équivaut à une distance d'environ 20 m (Kron et al., 2001).

Des chercheurs ont surveillé l'activité de la β-glucoronidase (GUS) dans des graines issues d'arbres se trouvant à des distances croissantes d'un rang de pommiers 'Gala' à transgène GUS afin de surveiller le flux de pollen dans un verger (Tyson et al., 2011). Ces auteurs ont noté que 95 % des graines transgéniques observées se trouvaient à moins de 15 m du rang de pommiers transgéniques (Tyson et al., 2011). Considérées dans leur ensemble, ces données portent à croire que la plus grande partie de la pollinisation croisée, dans les pommeraies commerciales, se produit entre les fleurs réceptives et les sources de pollen situées à proximité. Dans le cadre de certaines études, on a toutefois observé un flux de pollen sur des distances beaucoup plus grandes. Ces distances allaient jusqu'à 40 m (Wertheim, 1991), 86 m (Kron et al., 2001), 104 m (Reim et al., 2006), 137 m (Tyson et al., 2011) et 150 m (Soejima, 2007) dans les vergers, et jusqu'à près de 300 m (Larsen et Kjær, 2009) en milieu naturel. Le transfert de pollen viable dans la ruche, entre abeilles butinant dans des zones éloignées, pourrait expliquer le transport de pollen sur de grandes distances (DeGrandi-Hoffman et al., 1986).

Dans toutes les études mentionnées ci-dessus, la distance de la source de pollen était un facteur influant de manière appréciable sur la pollinisation. Parmi les autres facteurs importants figurent les conditions météorologiques, la présence d'un pollinisateur, la compatibilité du cultivar et le synchronisme de la floraison (Kron et al., 2001). Tyson et al. (2011) ont mis au point un modèle mécaniste, tenant compte des données sur le flux de pollen à transgène GUS, pour prédire le transfert de pollen par les abeilles. Les auteurs ont également utilisé leur modèle pour étudier l'effet des rangs tampons et des distances d'isolement sur les taux de croisement éloigné. Le modèle a montré que la taille relative des vergers transgéniques et classiques avait une incidence sur le taux de croisement éloigné. À mesure qu'on réduit la taille des vergers classiques par rapport à celle des vergers transgéniques, la distance d'isolement nécessaire pour limiter la fréquence des croisements éloignés augmente. De plus, la distance d'isolement nécessaire est généralement réduite lorsqu'on intègre des rangs tampons entre les deux types de verger (Tyson et al., 2011).

4.5 Ressemis spontanés Malus domestica cultivé

Le M. domestica n'est pas considéré comme une mauvaise herbe, mais ses semis peuvent être persistants, et l'espèce s'est échappée de culture tant aux États-Unis qu'au Canada (Brouillet et al., 2010+; ACIA et RNCan/SCF, 2011+; Kartesz, 1999; Scoggan, 1979; Stover et Marks, 1998; USDA-NRCS, 2012) . En général, les sujets spontanés issus de graines sont rares dans les vergers, en raison de la pérennité de l'espèce et des pratiques culturales utilisées en verger, notamment l'application d'herbicides dans les rangs et le fauchage des allées entre les rangs. Dans une étude réalisée dans l'État de New York, des chercheurs ont constaté que le M. domestica était une espèce pionnière des pâturages abandonnés, mais non des champs cultivés laissés en friche (Stover et Marks, 1998).

4.5.1 Lutte culturale et mécanique

On peut supprimer le M. domestica, en verger ou en milieu naturel, en coupant l'arbre à la base du tronc. Il faut ensuite tuer les racines en enlevant la souche, afin d'empêcher le drageonnement.

4.5.2 Lutte chimique

Comme il est mentionné précédemment, on peut supprimer les pommiers en les coupant à la base du tronc. Pour empêcher la repousse, on peut appliquer un herbicide à la souche, sur la partie exposée du cambium.

Dans les vergers commerciaux, on applique habituellement un herbicide dans les rangs contre les mauvaises herbes pouvant faire concurrence aux racines des pommiers pour l'humidité et les nutriments. L'herbicide permet aussi de lutter contre les ressemis spontanés de pommier. Différents herbicides, dont les modes d'action varient, peuvent être utilisés pour la production commerciale de pommes (pour obtenir une liste détaillée des herbicides, voir le tableau 13 du document de référence AAC, 2011).

4.5.3 Lutte intégrée contre les mauvaises herbes

La lutte intégrée fait appel à une combinaison de méthodes mécaniques, chimiques et culturales pour maximiser le rendement des cultures (Swanton et Weise, 1991). Comme les ressemis spontanés de pommier ne constituent pas un problème pour la production commerciale de pommes, aucune méthode de lutte intégrée n'a été mise au point.

4.5.4 Lutte biologique

Les ressemis spontanés de pommier ne constituant pas un problème pour la production commerciale de pommes, aucune méthode de lutte biologique n'a été mise au point.

4.6 Modes de déplacement et de dispersion

En milieu naturel, le déplacement et la dispersion des graines de pommier sont principalement assurés par les mammifères qui consomment des fruits, comme les ours, les renards et les cerfs (Myers et al., 2004; Willson, 1993), de même que par les oiseaux (Witmer, 1996). Comme les graines sont assez petites, elles ne sont pas mastiquées par les cerfs de Virginie qui mangent les fruits. Elles demeurent donc intactes et peuvent germer après leur passage dans le système digestif (Myers et al., 2004). Les cerfs de Virginie couvrent plusieurs hectares dans leurs déplacements quotidiens, et on estime qu'ils dispersent une faible quantité de graines (Myers et al., 2004; Williams et Ward, sans date) (voir la figure 2). En plus de leurs modes de déplacement et de dispersion naturels, les graines de pommier peuvent être dispersées par les humains avec la vente des fruits.

Cerf de Virginie mangeant des pommes en Ontario.
Figure 2. Cerf de Virginie mangeant des pommes en Ontario (photo de G. Thurston, ACIA).
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