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DD2002-37 : Détermination du risque environnemental associé aux lignées de pomme de terre SEMT15-02, SEMT15-15 et RBMT15-101 résistantes au doryphore de la pomme de terre et au virus Y de la pomme de terre par la société Monsanto Canada Inc.

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Distribué : 1999-04

Le présent document vise à expliquer la décision réglementaire prise conformément à la directive Dir94-08, Critères d'évaluation du risque environnemental associé aux végétaux à caractères nouveaux, au cahier parallèle T-1-09-96 La biologie du Solanum tuberosum L. (pomme de terre), et à la directive Dir95-03, Directive relative à l'évaluation des végétaux dotés de caractères nouveaux utilisés comme aliments du bétail.

L'Agence canadienne d'inspection des aliments (ACIA), plus précisément le Bureau de la biosécurité végétale de la Division de la production et de la protection des végétaux, et la Section des aliments du bétail de la Division de la santé des animaux et de la production, a évalué les données présentées par la société Monsanto Canada Inc. Ces données ont trait aux lignées de pomme de terre SEMT15-02, SEMT15-15 et RBMT15-101 (également connue sous l'appellation de NewLeaf-YMC. Ces végétaux ont été modifiés pour exprimer une résistance au doryphore de la pomme de terre et au virus Y de la pomme de terre. L'ACIA a établi que ces végétaux à caractères nouveaux (VCN) ne constituent pas une menace pour l'environnement et ne présentent pas non plus de danger pour le bétail consommant des aliments provenant de ces VCN. Ils sont en outre considérés comme essentiellement équivalents aux variétés de pomme de terre dont la production commerciale est actuellement autorisée au Canada.

La dissémination en milieu ouvert des lignées SEMT15-02, SEMT15-15 et RBMT15-101, y compris leur utilisation comme aliment du bétail, est par conséquent autorisée à compter du 20 avril 1999. Toute autre lignée et tout hybride intraspécifique de Solanum tuberosum qui seraient issus des mêmes transformations, ainsi que tous leurs descendants, peuvent également être disséminés, pourvu que i) aucun croisement interspécifique ne soit réalisé; ii) l'utilisation prévue soit semblable; iii) qu'une caractérisation ait démontré que ces végétaux ne présentent aucun autre caractère nouveau et qu'ils soient essentiellement équivalents, quant à leur utilisation précise et à leur risque pour l'environnement et pour la santé humaine et animale, aux variétés de pommes de terre présentement cultivées; iv) les gènes nouveaux soient exprimés au même degré que les lignées pour lesquelles l'autorisation a été obtenue; et v) les exigences décrites dans le présent document en matière de gestion de la résistance des ravageurs soient respectées.

Table des matières

  1. Brève identification des végétaux à caractères nouveaux (VCN)
  2. Données de base
  3. Description des caractères nouveaux
    1. Résistance au doryphore de la pomme de terre
    2. Résistance au virus Y de la pomme de terre
    3. Résistance à la kanamycine
    4. Méthode de mise au point
    5. Stabilité des caractères
  4. Critères d'évaluation du risque environnemental
    1. Possibilité que les VCN se comportent comme des mauvaises herbes pour l'agriculture ou envahissent les milieux naturels
    2. Possibilité de flux génétique vers des espèces sauvages apparentées risquant de produire des hybrides se comportant davantage comme des mauvaises herbes ou possédant une plus grande capacité d'envahissement
    3. Possibilité que les lignées SEMT15-02, SEMT15-15 et RBMT15-101 deviennent nuisibles
    4. Impact possible sur les organismes non visés
    5. Impact possible sur la biodiversité
  5. Possibilité que le doryphore acquière une résistance aux VCN
  6. Critères d'évaluation nutritionnelle en vue de l'utilisation comme aliment du bétail
    1. Composition nutritionnelle et analyse immédiate des VCN
    2. Facteurs antinutritionnels
  7. Décision réglementaire

I. Brève identification des végétaux à caractères nouveaux (VCN)

Désignation du VCN : Lignées SEMT15-02, SEMT15-15 et RBMT15-101

Demandeur : Monsanto Canada Inc.

Espèce végétale : Pomme de terre (Solanum tuberosum L.)

Caractères nouveaux : Résistance au doryphore de la pomme de terre, au virus Y de la pomme de terre et à la kanamycine

Méthode d'introduction des caractères : Transformation par Agrobacterium tumefaciens

Utilisation proposée des VCN : Production de pommes de terre pour l'alimentation humaine (pommes de terre de consommation et de transformation) et pour l'alimentation du bétail, y compris les résidus de la transformation des pommes de terre. Les VCN ne seront pas cultivés à l'extérieur des zones productrices normales de pomme de terre au Canada

II. Données de base

Les lignées de pomme de terre SEMT15-02, SEMT15-15 et RBMT15-101 de Monsanto Canada Inc. ont été créées par transformation des lignées parentales Shepody et Russet Burbank au moyen de trois gènes : le gène cry3A de Bacillus thuringiensis (Bt), qui confère une résistance au doryphore de la pomme de terre; le gène PVYcp de la protéine de l'enveloppe du virus PVY, qui confère une résistance à ce virus et le gène nptII, qui confère une résistance à la kanamycine et qui a été utilisé comme caractère de sélection spécifique pour faciliter la sélection des cellules transformées au laboratoire. Au Canada, ces lignées ont été évaluées dans des conditions confinées en Colombie-Britannique (1998-1999), en Alberta (1997-1999), en Saskatchewan (1998-1999), au Manitoba (1995-1999), en Ontario (1997-1999), au Québec (1997-1999), au Nouveau-Brunswick (1995-1999) et dans l'Île-du-Prince-Édouard (1995-1999).

Le doryphore de la pomme de terre (Leptinotarsa decemlineata Say.) est l'insecte qui cause le plus de dommages à la pomme de terre au Canada et, à ce jour, aucun cultivar résistant au doryphore n'a été obtenu par les méthodes classiques. Tant les larves que les adultes du doryphore se nourrissent du feuillage des plants de pomme de terre; l'insecte, lorsqu'il ne fait l'objet d'aucune mesure de lutte, peut défolier complètement les plants de pomme de terre, ce qui entraîne une réduction du rendement pouvant atteindre 85%. Les moyens de lutte actuels contre le doryphore font principalement appel à des insecticides dont l'efficacité varie en fonction de la sensibilité de l'insecte et de facteurs environnementaux. Les autres moyens de lutte, comme la rotation des cultures, la lutte par aspiration, le flambage au propane, l'utilisation de tranchées recouvertes de polyéthylène et le piégeage, sont moins efficaces.

Le virus Y de la pomme de terre (PVY) est l'agent causal de la mosaïque de la pomme de terre. Les symptômes varient beaucoup d'une souche du virus à l'autre et d'un cultivar de pomme de terre à l'autre, allant d'à peine perceptibles à une nécrose importante du feuillage qui finit par causer la mort du plant. Les pertes de rendement peuvent atteindre 80% chez les cultivars sensibles. Le PVY est transmis par plus d'une trentaine d'espèces de pucerons ou de façon mécanique par la sève d'un plant infecté. On combat actuellement le PVY en plantant des souches de pommes de terre exemptes du virus dans l'industrie et en appliquant des insecticides pour lutter contre les pucerons qui agissent comme vecteurs. Toutefois, dans le cas de variétés comme Shepody, qui sont asymptomatiques lorsqu'elles sont infectées par le PVY, il est difficile de déceler et d'éliminer les plants de pomme de terre atteints au champ et ainsi d'obtenir des pommes de terre de semence exemptes du virus.

Monsanto Canada Inc. a caractérisé les organismes hôtes et donneurs, les vecteurs plasmidiques, les gènes insérés et les produits géniques, y compris le nombre de sites d'insertion et de copies des gènes dans les lignées SEMT15-02, SEMT15-15 et RBMT15-101. Les nouvelles protéines ont été identifiées, caractérisées et comparées aux protéines bactériennes et virales originales; leur toxicité éventuelle pour le bétail et les organismes non visés, tout particulièrement les arthropodes utiles, a également été déterminée. Le comportement agronomique a été évalué par la mesure du rendement, du peuplement, de la vigueur, de la présence de coeur creux, de la présence de coeur brunâtre et de la densité. L'adaptation au stress, notamment la sensibilité à divers ravageurs et pathogènes de la pomme de terre, a également été déterminée.

Les conséquences de l'introduction des lignées SEMT15-02, SEMT15-15 et RBMT15-101 dans l'environnement ont été évaluées conformément aux critères suivants servant à l'évaluation du risque environnemental associé aux végétaux à caractères nouveaux, lesquels critères sont énoncés dans la directive de réglementation Dir94-08:

L'ACIA a consulté l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire de Santé Canada à propos des questions liées à l'apparition éventuelle de populations de doryphore de la pomme de terre résistantes à la protéine insecticide produite par les végétaux transformés renfermant les gènes de Bt. Le développement éventuel d'une résistance à la protéine insecticide Cry3A chez des populations de doryphore exige de Monsanto Canada Inc. qu'elle mette sur pied un plan de gestion de la résistance des insectes pour atténuer le développement éventuel d'une telle résistance du doryphore à la protéine insecticide Cry3A.

Santé Canada a déterminé que les aliments issus de ces pommes de terre sont essentiellement équivalents à ceux issus des pommes de terre actuellement commercialisées (mai 1999). La commercialisation des lignées SEMT15-02, SEMT15-15 et RBMT15-101 a également été autorisée aux É.-U.

La Section des aliments du bétail de la Division de la santé des animaux et de l'élevage de l'ACIA a déterminé l'innocuité des aliments du bétail issus des lignées SEMT15-02, SEMT15-15 et RBMT15-101 conformément aux critères suivants servant à l'évaluation de l'innocuité et de l'efficacité des aliments du bétail, lesquels critères sont énoncés dans la directive de réglementation Dir95-03:

La composition nutritionnelle et l'analyse immédiate des tubercules ont été exécutées. Des données appuyant l'utilisation des lignées SEMT15-02, SEMT15-15 et RBMT15-101 dans l'alimentation du bétail ont également été fournies.

III. Description des caractères nouveaux

1. Résistance au doryphore de la pomme de terre

Les nouvelles lignées SEMT15-02, SEMT15-15 et RBMT15-101 produisent une version de la protéine insecticide Cry3A issue de Bacillus thuringiensis, ainsi qu'une protéine de l'enveloppe de la souche ordinaire du virus Y de la pomme de terre (PVY-O). Les delta-endotoxines, comme la protéine Cry3A exprimée par les lignées de pomme de terre SEMT15-02, SEMT15-15 et RBMT15-101, agissent en se liant à des récepteurs spécifiques situés sur la bordure en brosse de l'épithélium de l'intestin des espèces d'insecte sensibles. Suite à cette liaison, des pores spécifiques de cations sont formés qui perturbent le flux ionique dans l'intestin et provoquent la paralysie et la mort de l'insecte. La Cry3A ne s'attaque qu'aux insectes de l'ordre des Coléoptères, et son action spécifique est directement attribuable à la présence de récepteurs spécifiques chez les insectes cibles. Comme il n'existe pas de récepteurs pour les delta-endotoxines de B. thuringiensis à la surface des cellules intestinales des mammifères, le bétail et les humains ne sont pas sensibles à ces protéines.

2. Résistance au virus Y de la pomme de terre

Le PVY est un membre typique du groupe des potyvirus; c'est un virus à ARN transmissible par les pucerons qui infecte communément la pomme de terre et qui est responsable de graves dommages et de lourdes pertes économiques. Les séquences virales introduites dans les lignées SEMT15-02, SEMT15-15 et RBMT15-101 n'induisent pas la formation de particules infectieuses, et leur expression ne cause aucune maladie. Les cultivars de pomme de terre génétiquement modifiés manifestent le caractère de résistance à l'infection par le PVY et à une maladie subséquente par un processus apparenté à la protection croisée.

3. Résistance à la kanamycine

Le gène de la résistance à la kanamycine, isolé de la bactérie E. coli, code pour une enzyme (NPTII) qui phosphoryle la kanamycine, ce qui la rend inactive, et confère ainsi une résistance à cet antibiotique. Le gène nptII a été utilisé comme agent de sélection spécifique pour faciliter la sélection des cellules transformées au laboratoire.

4. Méthode de mise au point

Les lignées transgéniques Shepody (SEMT12-02 et SEMT15-15) et Russet Burbank (RBMT15-101) ont été créées par deux événements distincts de transformation par Agrobacterium dans lesquels l'ADN transféré (ADN-T) renfermait le gène cry3A codant pour la protéine Cry3A de B. thuringiensis subsp tenebrionis et le gène PVYcp codant pour la protéine de l'enveloppe du PVY-O. En outre, l'ADN-T renfermait le gène nptII codant pour la néomycine phosphotransférase II (NPTII). L'expression de l'activité de cette enzyme a été utilisée comme caractère de sélection spécifique pour cribler les plants transformés à la recherche des gènes cry3A et PVYcp. Un autre fragment d'ADN extérieur aux séquences délimitant l'ADN-T a été incorporé au génome des lignées SEMT15-02 et SEMT15-15 de la variété Shepody. Ces lignées renfermaient également le gène aad qui code pour la 3'(9)-O-aminoglycoside adényltransférase, une enzyme qui confère une résistance bactérienne à la spectinomycine et à la streptomycine. Le gène aad n'est pas exprimé dans les tissus végétaux; sa présence sur le plasmide Ti a servi de caractère de sélection spécifique pour déceler les colonies bactériennes renfermant le vecteur plasmidique.

5. Stabilité des caractères

L'expression constitutive de la protéine Cry3A a été démontré dans chaque lignée transgénique des variétés Shepody et Russet Burbank. Dans l'ensemble, les quantités de protéine Cry3A produites dans les feuilles et les tubercules des lignées SEMT15-02, SEMT15-15 et RBMT15-101 étaient comparables aux concentrations qui ont déjà été signalées pour les cultivars NewLeaf Atlantic et Russet Burbank (voir DD96-06 et DD97-20). L'expression de la protéine de l'enveloppe du PVY-O n'a pas été observée dans les feuilles et les tubercules des lignées SEMT15-02, SEMT15-15 et RBMT15-101 à un seuil de détection de 2 ng/mg de poids frais. Par contre, l'accumulation de la protéine de l'enveloppe dans des plants naturellement infectés par le PVY-O est facile à détecter par dosage immunoenzymatique (ELISA) et par transfert de Western. Comme il n'est pas rare que les cultures de pomme de terre commerciales soient gravement infectées par le PVY-O, le bétail (et les humains) risquent d'être davantage exposés à la protéine de l'enveloppe de PVY-O en consommant des pommes de terre issues de ces source que celles issues des lignées SEMT15-02, SEMT15-15 et RBMT15-101.

Les données fournies montrent que l'expression des caractères est stable au cours de quatre générations à partir de l'événement de transformation original.

IV. Critères d'évaluation du risque environnemental

1. Possibilité que les VCN se comportent comme des mauvaises herbes pour l'agriculture ou envahissent les milieux naturels

L'ACIA a évalué les renseignements fournis par Monsanto Canada Inc. en ce qui concerne le potentiel reproductif et la capacité de survie des lignées de pomme de terre SEMT15-02, SEMT15-15 et RBMT15-101 et a établi que la vigueur végétative, la capacité de survie hivernale, la sensibilité aux insectes et aux maladies autres que le doryphore de la pomme de terre et la maladie causée par le PVY ainsi que le rendement et la qualité des tubercules de ces lignées se comparent à la gamme de caractères s'exprimant actuellement chez les variétés commerciales. Les lignées SEMT15-02, SEMT15-15 et RBMT15-101 n'ont aucun gène spécifique supplémentaire codant pour la tolérance au froid ou l'hibernation.

Selon le document T-1-09-96, décrivant la biologie du Solanum tuberosum, les sujets non modifiés de cette espèce n'envahissent pas les habitats sauvages au Canada. Selon les renseignements fournis par Monsanto Canada Inc., les lignées SEMT15-02, SEMT15-15 et RBMT15-101 ne sont pas différentes de leurs contreparties à cet égard. Aucun avantage compétitif n'a été conféré aux lignées SEMT15-02, SEMT15-15 et RBMT15-101, si ce n'est la résistance au doryphore et au PVY. Or, cette résistance ne rendra pas les pommes de terres nuisibles ou envahissantes pour les habitats naturels, puisque les caractéristiques de multiplication végétative inhérentes à l'espèce sont restées les mêmes. Bien qu'une dispersion limitée soit possible par les tubercules, les plants spontanés ne persistent pas sous les régimes de culture usuels ni dans les habitats sauvages.

À la lumière de ces considérations, l'ACIA conclut que les pommes de terre des lignées SEMT15-02, SEMT15-15 et RBMT15-101 ne risquent pas plus de se comporter en mauvaises herbes ni de devenir envahissantes que les variétés de pommes de terre actuellement offertes sur le marché.

2. Possibilité de flux génétique vers des espèces sauvages apparentées risquant de produire des hybrides se comportant davantage comme des mauvaises herbes ou possédant une plus grande capacité d'envahissement

Selon le document T-1-09-96, décrivant la biologie du Solanum tuberosum, il n'existe au Canada aucune espèce sauvage apparentée s'hybridant naturellement avec le S. tuberosum, et les caractères nouveaux n'ont pas modifié l'incapacité des lignées

SEMT15-02, SEMT15-15 et RBMT15-101 de s'hybrider à des espèces sauvages apparentées. En conséquence, l'ACIA conclut qu'un flux génétique des lignées SEMT15-02, SEMT15-15 et RBMT15-101 vers des espèces voisines de la pomme de terre ne peut se produire au Canada.

3. Possibilité que les lignées SEMT15-02, SEMT15-15 et RBMT15-101 deviennent nuisibles

L'effet recherché au moyen des caractères nouveaux introduits chez les lignées SEMT15-02, SEMT15-15 et RBMT15-101 n'a aucun lien avec la possibilité que ces végétaux puissent devenir des mauvaises herbes. Les caractéristiques agronomiques des lignées SEMT15-02, SEMT15-15 et RBMT15-101 se sont révélées semblables à celles des variétés classiques de pommes de terre Shepody et Russet Burbank. La sensibilité aux maladies (brûlure alternarienne, mildiou, flétrissement verticillien, enroulement) est également demeurée la même. On peut donc conclure que la possibilité que ces lignées deviennent nuisibles n'a pas été modifiée par inadvertance.

Recombinaison: On définit la recombinaison comme l'échange de séquences nucléotidiques entre deux molécules d'acide nucléique. La recombinaison entre des génomes viraux se traduit par des modifications héréditaires permanentes. La persistance d'un génome viral recombiné varie en fonction de sa valeur adaptative au sein de la cellule hôte originale, de sa capacité de se répliquer en présence des virus parentaux, de sa capacité de se propager dans l'organisme hôte et de sa capacité à se transmettre à d'autres plante hôtes. À partir des renseignements suivants fournis par Monsanto Canada Inc., l'ACIA est arrivée à la conclusion que puisque le transgène viral est issu d'un virus qui infecte naturellement la pomme de terre et qu'il est produit en moins grande concentration que lors d'une infection naturelle de la pomme de terre, en cas de recombinaison, le virus résultant devrait concurrencer les autres virus qui infectent la pomme de terre, et la probabilité d'interactions nouvelles et de formation de virus recombinant n'est pas plus élevée que lors d'infections mixtes naturelles. En outre, le virus recombinant ne serait pas plus concurrentiel face aux autres virus de la pomme de terre et pourrait être combattu par les méthodes agronomiques normales utilisées contre de nouveaux virus.

Synergie: La synergie s'observe lorsque deux virus en même temps infectent naturellement une plante et que les symptômes sont plus graves que lorsque seul l'un ou l'autre des virus infecte la plante. La synergie a été bien étudiée et décrite pour la première fois dans le cadre d'infections naturelles par le virus X (PVX) et par le virus Y (PVY) de la pomme de terre. Monsanto n'a observé aucun signe de synergie durant les essais au champ ou après une inoculation artificielle des plants avec le PVX.

Transcapsidation: Lorsqu'une cellule végétale est infectée naturellement en même temps par deux souches différentes d'un virus (ou par deux virus), il est possible que le génome d'un virus soit encapsidé par la protéine de l'enveloppe de l'autre virus. Lorsque le virus n'est encapsidé que par l'une des protéines de l'enveloppe, le phénomène s'appelle transcapsidation. Les modifications que pourraient porter les virions transcapsidés ne sont pas transmises lorsque ces derniers pénètrent dans un autre hôte; les effets éventuels seraient donc transitoires et ne présenteraient aucun risque de rendre ces pommes de terre nuisibles. Les expériences au champ en conditions confinées ont montré que les niveaux d'expression de la protéine de l'enveloppe du PVY restaient extrêmement faibles, même en présence d'un potyvirus envahisseur (PVA), ce qui a permis de conclure que la protéine de l'enveloppe du PVY transgénique n'est pas incorporée dans le virion du PVA à un seuil détectable. Comme on retrouve naturellement le PVA et le PVY dans les mêmes cellules de pomme de terre, des concentrations beaucoup plus élevées de protéine de l'enveloppe du PVY et du PVA s'accumulent durant les infections naturelles. Par conséquent, le risque de transcapsidation dû à l'utilisation agronomique de pommes de terre résistantes au PVY est beaucoup moins élevé que par co-infection naturelle avec le PVA et le PVY, et le risque que ces pommes de terre deviennent nuisibles n'est pas plus élevé.

Compte tenu de ce qui précède et du fait que la pomme de terre ne s'est jamais comportée comme un végétal nuisible au Canada, l'ACIA conclut que les variétés SEMT15-02, SEMT15-15 et RBMT15-101 ne présentent aucun risque accru de devenir des végétaux nuisibles.

4. Impact possible sur les organismes non visés

Le doryphore de la pomme de terre, l'insecte visé, a été maîtrisé dans des parcelles d'essai des lignées SEMT15-02, SEMT15-15 et RBMT15-101 pendant toute la saison de croissance. Monsanto Canada Inc. a démontré que la protéine Cry3A n'est pas toxique pour les organismes non visés, notamment l'abeille (larve et adulte), la coccinelle, la chrysope verte, la guêpe parasite, les espèces de Collembola, le ver de terre, la souris et le colin de Virginie.

Les protéines nouvelles étaient rapidement inactivées dans des liquides stomacaux de mammifère simulés (par des enzymes et la protéolyse induite par le pH). Les protéines exprimées par les lignées SEMT15-02, SEMT15-15 et RBMT15-101 étaient équivalentes aux protéines naturelles. On retrouve les protéines de l'enveloppe du PVY à des concentrations beaucoup plus élevées dans les cellules des pommes de terre infectées naturellement que dans celles des lignées SEMT15-02, SEMT15-15 et RBMT15-101.

Comme on l'a déjà précisé, il n'y pas de récepteurs des delta-endotoxines de B. thuringiensis à la surface des cellules intestinales des mammifères; le bétail et les humains ne sont donc pas sensibles à ces protéines.

Une comparaison de la séquence des protéines exprimées avec celles contenues dans une base de données sur des allergènes connus n'a révélé aucune homologie importante avec une de ces protéines allergènes.

À partir des renseignements qui précèdent, l'ACIA a établi que la dissémination en milieu ouvert des lignées SEMT15-02, SEMT15-15 et RBMT15-101 n'aura aucun impact significatif sur les organismes non visés, y compris l'être humain.

5. Impact possible sur la biodiversité

Les lignées de pomme de terre SEMT15-02, SEMT15-15 et RBMT15-101 ne possèdent aucun caractère phénotypique nouveau qui puisse en étendre l'utilisation au-delà des zones actuelles de culture de la pomme de terre au Canada. Comme aucune espèce sauvage ne peut s'hybrider à la pomme de terre au Canada, aucun caractère nouveau ne sera transféré dans les milieux sauvages.

L'utilisation des pommes de terre des lignées SEMT15-02, SEMT15-15 et RBMT15-101 pourrait entraîner une réduction des pulvérisations d'insecticides contre le doryphore et les pucerons et, par le fait même, une réduction des rejets de produits chimiques dans l'environnement, une augmentation des populations d'insectes non visés ainsi qu'une amélioration des possibilités de lutte biologique contre les insectes nuisibles. En conséquence, l'ACIA conclut que l'impact possible des lignées SEMT15-02, SEMT15-15 et RBMT15-101 sur la biodiversité n'est pas significatif et pourrait même être positif.

V. Possibilité que le doryphore acquière une résistance aux VCN

De nombreux documents traitent de la capacité du doryphore à acquérir une résistance aux insecticides chimiques classiques; plusieurs des insecticides chimiques foliaires homologués n'ont plus aucun effet sur cet insecte. Certains insecticides foliaires ayant comme matière active la protéine Cry3A de Bt sont homologués au Canada tant pour la pomme de terre que pour la tomate. À l'heure actuelle, le doryphore n'a pas acquis de résistance aux insecticides de type Bt pulvérisés sur le terrain. Des lignées d'insectes résistantes pourraient toutefois voir le jour si ce type d'insecticide était davantage utilisé ou si une exposition généralisée à des pommes de terre Bt comme celles des lignées SEMT15-02, SEMT15-15 et RBMT15-101 se produisait.

Les pommes de terre des lignées SEMT15-02, SEMT15-15 et RBMT15-101 produisent des concentrations élevées de protéine Cry3A dans tous les tissus de la plante pendant toute la saison de végétation, ce qui provoque un taux de mortalité très élevé chez les doryphores qui s'en nourrissent. Comme les insectes visés sont exposés à des concentrations de Bt passablement plus élevées que celles apportées par la pulvérisation d'insecticides foliaires, de très fortes pressions sélectives s'exercent sur les doryphores résistants. Dans le but de réduire l'apparition éventuelle de doryphores résistants à la protéine Cry3A, des plans de gestion de la résistance ont été élaborés et mis en oeuvre. Un des principaux volets des stratégies convenues de gestion de la résistance est l'aménagement obligatoire de refuges, c'est-à-dire des champs de pomme de terre non Bt situés à proximité où vivent des populations d'insectes sensibles à la protéine Cry3A. Si jamais des insectes résistants apparaissaient dans des champs de pomme de terre Bt, ce qui ne devrait se produire que très rarement, ces insectes pourraient probablement s'accoupler avec les insectes sensibles et engendrer des sujets hétérozygotes sensibles à la protéine Cry3A. L'efficacité de la stratégie des refuges pour prévenir l'apparition de doryphores résistants à la protéine Cry3A n'a pas encore été prouvée hors de tout doute. Il faudra donc gérer ces cultures de façon responsable et vérifier constamment qu'aucun sujet résistant n'apparaît dans les populations de doryphores.

L'ACIA estime que de bonnes pratiques de gestion peuvent retarder l'apparition de populations de doryphores résistantes. Le plan de gestion de la résistance pour les pommes de terre Bt que devra mettre en oeuvre Monsanto Canada Inc. devra comprendre au moins les éléments suivants:

  1. Monsanto Canada doit veiller à ce que chaque ferme ensemencée en pommes de terre ne comporte pas plus de 80% de sa superficie en pommes de terre NewLeafMC (pommes de terre NewLeaf-YMC et toutes les autres pommes de terre NewLeafMC transformées par les gènes de Bt) et laisse au moins 20% de la superficie plantée en pommes de terre comme refuge pour les doryphores.
  2. Monsanto Canada Inc. doit veiller à ce que les refuges prévus pour les doryphores soient gérés de manière à assurer une population viable suffisante de doryphores pour maintenir la fonctionnalité du refuge comme réservoir de doryphores sensibles au Bt. L'utilisation d'insecticides qui se traduisent par l'élimination des doryphores du refuge n'est pas compatible avec la gestion d'un refuge.
  3. Des outils de formation doivent être fournis à tous les producteurs et au personnel de la société qui travaille au champ: information sur le rendement des produits, la gestion de la résistance, les méthodes de surveillance et les calendriers, les protocoles de détection des doryphores résistants, la procédure à suivre pour communiquer avec Monsanto Canada Inc. en cas de besoin d'aide ou de renseignements et sur les stratégies à adopter si des dommages aux doryphores d'une ampleur imprévue sont constatés.
  4. Monsanto Canada Inc. devra prévoir une procédure pour réagir en cas de dommages imprévus aux doryphores. Cette procédure devra comprendre, au besoin, le prélèvement de tissus végétaux et de doryphores, l'utilisation d'essais biologiques appropriés pour évaluer les sujets soupçonnés d'être résistants à la protéine Cry3A et un protocole d'intervention immédiate pour lutter contre les sujets résistants.
  5. Les populations de doryphores dont la résistance est confirmée doivent être signalées immédiatement au Bureau de la biosécurité végétale de l'ACIA, et une stratégie de lutte contre ces ravageurs doit pouvoir être appliquée sans délai.
  6. Il faut promouvoir les pratiques de lutte intégrée, notamment la rotation des cultures et les autres méthodes de lutte contre les doryphores.
  7. Des recherches continues dans le domaine de la gestion de la résistance des doryphores reposant sur des critères scientifiques reconnus seront réalisées, et leurs résultats seront communiqués à l'ACIA.

L'ACIA se réserve le droit de demander la modification de tout plan de gestion de la résistance lorsque la présentation de nouveaux renseignements le justifie et conformément à l'article 112 de la partie V du Règlement sur les semences.

VI. Critères d'évaluation nutritionnelle en vue de l'utilisation comme aliment du bétail

1. Composition nutritionnelle et analyse immédiate des VCN

Une détermination de la composition nutritionnelle et l'analyse immédiate des lignées SEMT15-02, SEMT15-15 et RBMT15-101 et des variétés témoins Shepody et Russet Burbank ont été exécutées. La composition nutritionnelle des trois lignées transgéniques a été établie par un dosage des solides totaux, des protéines solubles, du dextrose, du sucrose, des glycoalcaloïdes, de la vitamine B6, de la niacine, de la vitamine C, du potassium, du cuivre, du magnésium et des acides aminés. L'analyse immédiate comprenait les protéines totales, la teneur en eau, les lipides totaux, les cendres, les fibres brutes, les glucides et les calories. Tous les résultats relatifs aux constituants analysés pour les lignées transgéniques étaient statistiquement identiques à ceux obtenus pour les témoins ou dans les limites des valeurs signalées dans la littérature pour des cultivars de pomme de terre cultivés à l'échelle commerciale.

2. Facteurs antinutritionnels

La solanine et la chaconine sont les principaux glycoalcaloïdes mesurés couramment dans les tubercules de pomme de terre. La détermination de la concentration des glycoalcaloïdes totaux dans les lignées transgéniques SEMT15-02, SEMT15-15 et RBMT15-101 a montré que dans chaque cas, la concentration est inférieure à la ligne directrice administrative de 20 mg/100 g de poids frais qui a été établie au préalable pour les glycoalcaloïdes totaux dans la pomme de terre.

VII. Décision réglementaire

Après examen des données et des renseignements présentés par Monsanto Canada Inc. et après comparaison détaillée des lignées SEMT15-02, SEMT15-15 et RBMT15-101 avec des contreparties non modifiées de Solanum tuberosum, le Bureau de la biosécurité végétale de la Division de la production et de la protection des végétaux de l'ACIA conclut que les gènes nouveaux et les caractères correspondants ne confèrent aucun avantage écologique intentionnel ou non aux lignées SEMT15-02, SEMT15-15 et RBMT15-101 à la suite d'une dissémination en milieu ouvert.

Après examen des données et des renseignements fournis par Monsanto Canada Inc., la Section des aliments du bétail de la Division de la santé des animaux et de l'élevage conclut que les gènes nouveaux ne suscitent pas d'inquiétude quant à l'innocuité ou à la composition nutritionnelle des lignées SEMT15-02, SEMT15-15 et RBMT15-101. Solanum tuberosum et plusieurs de ses sous-produits figurent actuellement à l'Annexe IV du Règlement sur les aliments du bétail. Leur utilisation est donc approuvée pour l'alimentation du bétail au Canada. Comme les tubercules et les plants des lignées SEMT15-02, SEMT15-15 et RBMT15-101 ont été déclarés, après évaluation, équivalents à ceux des variétés de pommes de terre classiques sur le plan nutritionnel, les lignées SEMT15-02, SEMT15-15 et RBMT15-101 et leurs sous-produits sont considérés comme conformes à la définition actuelle d'ingrédient, et leur utilisation en cette qualité dans les aliments du bétail est approuvée au Canada.

La dissémination en milieu ouvert des lignées SEMT15-02, SEMT15-15 et RBMT15-101, y compris leur utilisation comme aliment du bétail, est par conséquent autorisée à compter du 20 avril 1999. Toute autre lignée et tout hybride intraspécifique de Solanum tuberosum qui seraient issus des mêmes transformations, ainsi que tous leurs descendants, peuvent également être disséminés, pourvu que i) aucun croisement interspécifique ne soit réalisé; ii) l'utilisation prévue soit semblable; iii) qu'une caractérisation ait démontré que ces végétaux ne présentent aucun autre caractère nouveau et qu'ils soient essentiellement équivalents, quant à leur utilisation précise et à leur risque pour l'environnement et pour la santé humaine et animale, aux variétés de pommes de terre présentement cultivées; iv) les gènes nouveaux soient exprimés au même degré que les lignées pour lesquelles l'autorisation a été obtenue; et v) les exigences décrites dans le présent document en matière de gestion de la résistance des ravageurs soient respectées.

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